Le 23/05/2018

Les WISE’Labs réunissent une cinquantaine de chercheurs sur les thématiques Connected devices, Smart sensors et Smart Power. Découvrez l’aventure scientifique d’un de ses acteurs, Sébastien Pillement, parti pendant un an développer des expertises nouvelles aux États-Unis.

Sébastien PILLEMENT

Bonjour Sébastien, pouvez-vous vous présenter ?

Bien sûr. Je suis enseignant-chercheur HDR à Polytech'Nantes depuis 2012 et rattaché avec mon équipe nantaise SysCom (Systèmes Communicants) à l’Institut d’Électronique et de Télécommunications de Rennes (UMR 6164). Je suis également le référent du WISE’Lab Connected Devices – les systèmes électroniques intelligents pour les objets connectés –  qui organise les collaborations entre chercheurs pour développer nos expertises et les proposer comme services aux industriels.

  

Parlez-nous de votre expérience : en quoi consiste cette année passée à l'étranger ?

Elle s’inscrit dans le cadre du CRCT, le Congé pour Recherches ou Conversion Thématiques, dispositif national qui finance la mobilité provisoire de chercheurs français au sein d’équipes à l’étranger, pendant six mois ou un an maximum. J’ai donc obtenu un détachement aux États-Unis, où je souhaitais vivre cette expérience. Nous avons posé nos valises à la UMass University – l’Université du Massachussets et plus précisément au « VLSI, CAD and Embedded Systems Research Center » positionné sur le campus principal à Amherst, près de Boston. Je dis nous, car ma femme et mes enfants m’ont également accompagné.

 

Le financement d’un CRCT n’est pas facile à obtenir : quel était votre projet ?

Effectivement, il n’est pas forcément facile de se faire financer un tel projet : de nombreux projets sont proposés et seulement 1/3 d’entre eux sont acceptés chaque année ! Ce type de détachement m'offre une chance énorme : avoir du temps consacré uniquement à la recherche sans les contraintes administratives du quotidien, mais aussi tout simplement la découverte humaine d'autres équipes et d'une autre culture de travail… tout en conservant mon poste à l'Université de Nantes !

Pour mon laboratoire, se détacher du temps pour la recherche pendant plusieurs mois permet de prendre une bouffée d'oxygène pour monter en compétences sur de nouveaux sujets connexes avec les compétences déjà maîtrisées au sein de nos laboratoires. Et puis n'oublions pas l'expérience familiale qui est juste exceptionnelle !

 

Quels sont les domaines sur lesquels vous avez développé vos compétences ?

Mes intérêts de recherche portent sur les plateformes adaptables dynamiquement pour les milieux de l’électronique professionnelle.

L’objectif principal de mes travaux se concentre sur la conception d’architectures flexibles et efficaces gérées en temps réel et la manière d’utiliser leurs propriétés intrinsèques afin d’augmenter la fiabilité des systèmes intelligents utilisées dans les objets connectés ou l’IoT (Internet of Things) par exemple.

 

Mon objectif est d’appréhender l’ensemble des contraintes, de la conception à l’utilisation de ces systèmes pour qu’ils apportent aux objets connectés dans lesquels ils sont intégrés les caractéristiques d’usage attendues, notamment sur le plan de la sobriété énergétique et de leur fiabilité pendant toute la durée de vie programmée du produit.

En résumé, l'idée est de travaillé sur la fiabilisation des systèmes vis à vis de la consommation d'énergie, l'optimisation du temps de calcul et l'utilisation des nouvelles techniques de fiabilité.

 

Cependant de nouvelles contraintes dans la conception des systèmes embarqués sont maintenant incontournables.

Je cherchais donc avec cette année « hors sol » à acquérir des compétences autour de la sécurité avec le Professeur Russel Tessier.

Et de renforcer une deuxième compétence autour de la vérification formelle de circuits arithmétiques avec le Professeur Maciej Ciesielski.

 

Cela ouvre de nouvelles perspectives : nous allons pouvoir développer des compétences nouvelles en matière de sécurité au sein de l’IETR. D'autant plus que nous pourrions recruter un maître de conférences sur le sujet, qui pourra également apporter au programme WISE en complétant nos compétences sur la thématique industrie du futur de notre plateau nantais.

 

 

Et vos collègues américains, quelles sont leurs méthodes de travail ?

Déjà, l’organisation universitaire n’est pas la même. En France, un professeur travaille en équipe avec des collègues ; il peut échanger avec eux, partager et améliorer ses pratiques. Et il encadre, souvent en collaboration bien entendu, des étudiants en doctorats et en master. Aux Etats-Unis, le professeur est seul avec une équipe d’étudiants. Et il est seul responsable de ses travaux de recherche.

 

Ce qui m’a le plus frappé, c’est qu’ils ont des relations avec les industriels qui sont extraordinaires. Les chercheurs et les entreprises dialoguent facilement ensemble et mettent en place des collaborations assez facilement, en mode projet sur des durées courtes (1 an en général). Cette proximité acquise dans la collaboration créée des liens économiques qui par conséquence nécessitent moins de financements publics.

 

Ces relations sont assez simples à mettre en place et se font en direct, sans structure administrative intermédiaire, ce qui est gage d’efficacité, de rapidité et de réactivité. Par contraste, la structuration du financement de l’innovation en France apparaît particulièrement touffue. Il y a plein de guichets : la SATT, les Universités, les programmes tels que WISE, l'ANRT, les FUI...

 

Je crois qu’on pourrait en tirer des leçons pour simplifier notre approche des PME et PMI : aller vers leurs dirigeants pour mieux expliquer les bénéfices que chacun peut retirer de ces collaborations. Ainsi nous éviterons que la petite entreprise, qui a identifié un problème technique clair, n’abandonne son projet du fait de la complexité administrative pour accéder aux compétences de la recherche.

 

Des exemples ?

Un fait tout d’abord : l'industrie électronique américaine se porte bien. Il y a tout un écosystème industriel qui se développe, accompagné au niveau national par la NSF qui est l’équivalent américain de l’Agence Nationale de la Recherche sur les projets les plus ambitieux ou sur des thématiques précises. Mais au-delà de ce cadre, les équipes de recherche et les industriels n’attendent pas des appels à projets publics pour collaborer au quotidien.

Un autre exemple : en France le problème majeur c'est la synchronisation car les étudiants sont rarement disponibles pour nos laboratoires au bon moment. Tout est soumis au calendrier universitaire, avec une disponibilité en septembre. A cette période, côté financement, nous n’avons pas en général les réponses aux projets proposés. Nous voudrions être capables d’embaucher quelqu’un tout de suite sans retarder les choses. Aux USA les projets (NSF ou autres) se font au fil de l'eau ce qui simplifie le travail collaboratif.

 

Les WISE'Labs développent à l’échelle régionale des Capteurs intelligents (Smart sensors), des systèmes embarqués pour l'IoT (Connected devices) et de l'énergie intelligente (Smart power). Quel bénéfice votre expérience peut-elle apporter aux WISE'Labs ?

 Et bien tout ce que je viens de citer, cela donne déjà de solides pistes : il nous faut nous ouvrir davantage aux entreprises, mieux coordonner les différentes ressources pour lancer les projets sans attendre et aider les structures qui nous accompagnent à mieux répondre à nos contraintes et besoins – plutôt que de nous rajouter du travail administratif.

 

WISE propose des actions en ce sens. C’est aujourd’hui des financements – nous en avons déjà obtenu trois depuis son lancement - et ça nous permet d’accélérer.

 

En tant que Responsable de l'équipe systèmes embarqués de mon laboratoire et référent Connected devices du programme WISE, je compte également diffuser à plus long terme cette culture de la collaboration. Le programme WISE et les WISE’Labs offrent un cadre parfait pour cela et je souhaite contribuer à ce biotope pour qu’il puisse profiter à tout le monde !

 

Il n'est pas forcément évident d'aller travailler à l'étranger. Quels conseils donneriez-vous aux enseignants-chercheurs qui voudraient tenter l'expérience ?

Je veux déjà leur dire qu'il ne faut pas hésiter bousculer ses habitudes en allant travailler dans un nouvel environnement. Quand nous avons élaboré ce projet avec mon épouse, c'était aussi bien dans une visée professionnelle que personnelle et familiale. Je remercie ici mes collègues de Polytech'Nantes qui ont dû palier mon absence, du coup.

Ensuite cela demande une réelle implication de la part de son conjoint - par chance mon épouse avait déjà vécu un an aux Etats-Unis. Les appréhensions sont parfois présentes : vais-je réussir à facilement dépasser la barrière de la langue ? Comment vont se dérouler les relations de travail ? Comment organiser mon absence sans pénaliser les projets du laboratoire ? 

Et puis, finalement, on se rend compte que les fondamentaux de la langue reviennent vite, que l'accueil est chaleureux au sein de ces équipes de recherche et que le lien avec les collègues restés en France est vraiment très fort. Enfin cela restera une expérience gravée à vie dans la tête et dans le coeur de toute la famille. Ce n'est pas tous les jours qu'on peut avoir cette chance !

 

Comment votre famille vit-elle cette expérience ?

Avec la famille, c'est très simple : ils se régalent ! Les enfants parlaient assez peu anglais, et en quelques mois il s'expriment simplement.

Ce qui facilite les choses c'est que les Américains sont positifs. Ils apprécient l'effort : "tu as essayé, même si tout n'est pas réussi, c'est très bien ! " Nous sommes tous formatés d'une autre façon en France, moi compris. Mais il faut savoir abandonner certains réflexes, s'ouvrir et tirer les enseignements de cette culture de l'encouragement.

 

De retour prochainement à votre la boratoire de l'IETR, comment s'annonce la suite ?

Je rentre à la mi-août en France, cela fera sans doute le même effet qu'à l'aller mais dans l'autre sens : un certain dépaysement !

Avec le recrutement d'un nouvel enseignant - chercheur et les pistes de recherche imaginées ici je ne pas m'ennuyer. Il y a un intérêt majeur pour le programme WISE dans sa dimension Recherche Formation Innovation, c'est l'ouverture à l'international avec toutes les nouvelles connexions scientifiques que j'ai développés avec des chercheurs de nombreux pays (Montréal, USA, Brésil, Mexique,...)

Avec cela, plus toutes les nouvelles idées dans l'évolution de nos pratiques, la feuille de route est toute tracée !

 

Pour en savoir plus : Les thématiques de recherche de Sébastien Pillement

Mon champ de recherche concerne l’électronique intégrée dans les systèmes intelligents. Afin d’appréhender l’ensemble des contraintes de la conception à l’utilisation de ces systèmes, mes activités de recherches s’articulent selon deux thématiques :

 

Architectures flexibles faible consommation et tolérantes aux fautes

Définition de nouvelles architectures embarquées. Plus particulièrement dans le cadre de la conception de systèmes reconfigurables.

 

Mes travaux adressent la problématique de la création d’une plate-forme flexible avec une efficacité énergétique la plus grande possible et enchâssant les mécanismes nécessaires afin d’améliorer la tolérance aux fautes de la plate-forme.

Méthodes et conception système

 

La mise en place d’outils et de méthodes adaptés aux systèmes embarqués critiques. Plus particulièrement à la définition de modèles d’évaluation de la fiabilité des systèmes embarqués à un haut niveau d’abstraction.

 

Ainsi la fiabilité est considérée comme un objectif de génération d’une architecture dès les premières phases de la spécification. Dans cet axe je travaille aussi à l’intégration de la vérification en ligne permettant de surveiller un système embarqué temps réel.

 

 

 

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